Fabrice Jordan

Méditation taoïste de l’autre côté du calme et de la clarté

« Il y a beaucoup de confusion en ce qui concerne la méditation taoïste. Globalement, ce qu’on entend par « petit circuit céleste » dans le Qi Gong moderne n’a rien à voir avec son corollaire dans la méditation taoïste (neidan/ alchimie interne). Ce sont les mêmes noms, mais pas du tout les mêmes réalités. On devrait d’ailleurs utiliser d’autres termes pour en parler.

Avant, ces techniques étaient gardées secrètes, car elles nécessitent la présence du maître, dans un enseignement personnalisé. Surtout lors de certaines étapes spécifiques. Les maîtres n’en parlaient qu’à ceux qui avaient suffisamment travaillé pour comprendre et bénéficier de l’enseignement. Cela se faisait naturellement, car le maître et l’élève se connaissaient bien et se voyaient souvent. Le maître avait donc tout loisir d’évaluer les choses régulièrement.

Aujourd’hui, nous sommes obligés d’en parler, car ce qui est enseigné sous le nom de petit circuit céleste peut être dangereux, par incompréhension de ce qui est en jeu.

Ne croyez pas que je critique ici l’Occident. C’est vrai chez vous, mais le problème est peut-être encore pire en Chine contemporaine. On voit maintenant des centaines de séminaires annoncés sur ces thèmes, par des pseudo-maîtres chinois, qui inventent de nouvelles techniques ou qui vous promettent d’ouvrir votre circuit céleste ou votre troisième œil sur un week-end ou une semaine. Et les gens y croient.

Quelle différence entre les pratiques du Qi Gong et le Nei Dan ? C’est assez simple : le petit circuit céleste, qui est un phénomène spontané, se trouve de l’autre côté du calme et de la clarté. Il implique forcément de passer d’abord par un état d’absorption et d’oubli de soi dont sont incapables la très grande majorité des pratiquants. Ce n’est pas une critique, c’est un état de fait. Ce n’est qu’à cette condition que ce que l’on appelle « petit circuit céleste » peut se mettre en route spontanément, de manière très lente, ouverte et non volontaire.

Paradoxalement, le passage par le calme implique un temps où il y a absence totale de sensations quelles qu’elles soient. Mais derrière ce passage, les sensations peuvent devenir tellement fortes qu’elles peuvent faire peur. C’est au moment où le petit circuit céleste s’ouvre réellement, que l’on a besoin du maître, qui contrôle alors le processus et le régule en cas de besoin.

Que se passe-t-il en Qi Gong alors ? Les gens ont bien des sensations, parfois rapides, et parfois spectaculaires. Ils sentent de la chaleur, des circuits, des points, des vibrations, parfois de la lumière, etc…Dans le neidan, on dit qu’ils mobilisent un Qi lié au feu et très superficiel, même si cette sensation peut être ressentie jusque dans la moelle des os. Cela semble profond, mais du point de vue traditionnel, la qualité du Qi, sa nature même reste très grossière. Le danger est qu’avec la volonté, on fait circuler un Qi qui d’une part est déjà souvent déficitaire, mais en plus, on le « brûle » sous l’effet de la volonté et alors même qu’on croit le travailler, le canaliser voire le thésauriser, en réalité on le disperse et on « l’évapore

Si on le fait un petit peu, ce n’est pas mauvais. Mais si on le fait intensivement, et cela concerne souvent de bons pratiquants mal informés, alors c’est là que les problèmes peuvent survenir, qui peuvent être très graves.

J’espère que nous aurons l’occasion d’en reparler à l’avenir et surtout, de pratiquer la méthode consistant à augmenter « l’Eau qui est le préalable indispensable à la naissance spontanée du Feu véritable ».

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